Il y a un mois, le 23 juin 2022, le jury du Diplôme Universitaire d’Histoire et Généalogie Familiale de l’Université du Mans sélectionnait les étudiantes et les étudiants de la future promotion Bigorre.
Quelques jours plus tard, j’ai eu la joie de recevoir un message m’indiquant, noir sur blanc, que je ferai partie de cette promotion.
Formalités d’inscription réalisées et carte d’étudiante en poche, je me prépare pour ma reprise d’études.
En parallèle je suis le Tour de France de généalogie et l’idée de commencer à travailler sur d’autres généalogies que la mienne ou celle de Monsieur a germé dans ma petite tête.
Tour de France cycliste 2022, la vingtième étape est un contre-la-montre : Lacapelle-Marival- Rocamadour. Je connais de nom la ville du départ, ou plutôt l’un de ses hameaux, Bétille, situé à l’est de cette commune du Lot. Avant que les coureurs cyclistes ne quittent la région, je vous propose d’embarquer dans ma voiture-balai et de faire un détour en Quercy.
Je sais que le village compte une location saisonnière. C’est l’occasion de passer la nuit à Bétille, à la bastide « Vilapourte ».
Je ne sais pas d’où lui vient ce nom. Il faudra que je pense à poser la question.
La location actuelle a pris place dans la grange d’autrefois. Les meurtrières ont été conservées.
Je vous laisse découvrir le site Internet plus bas et vous propose que nous regardions ensemble quelques prises de vues glanées sur la toile.
Le long bâtiment est la grange réaménagée en gîte.
Au nord la maison elle-même.
Mais qu’est-ce que ces deux petits bâtiments au-dessus de la maison et entre le logis et la grange ?
La photo aérienne est un peu plus parlante mais c’est en visitant que les choses s’éclairent.
Le four à pain est essentiel dans les villages et celui-ci indique que la propriété est importante puisqu’elle en dispose. Il y a quelques années il était encore utilisé quelques fois par an.
Et puis le séchoir à châtaignes, emblématique de la région. Le Lot compte encore parmi les départements français producteurs de châtaignes. Il y existe même une variété de châtaigniers, « la bouche de Betizac », capable de résister au Cynips. Cet hyménoptère, originaire de Chine, provoque des galles sur les arbres et empêche développement et fructification.
La châtaigne était au XIXème siècle un élément incontournable de l’alimentation des régions de montagnes et du Périgord voisin.
Les habitants de Bétille produisaient-ils des châtaignes pour leur consommation ou pour les vendre ?
Mes voyages numériques ne me permettent pas de le savoir. On m’a seulement dit qu’avant la transformation de la grange en location saisonnière, la maison appartenait à une famille AMADIEU.
Des AMADIEU à Bétille et dans la région, ce n’est pas ce qui manque dans les archives du Lot.
Regardons d’un peu plus près les recensements de Lacapelle-Marival.
Le site annonce des numérisations pour les recensements entre 1836 et 1931. Mais pour la commune qui nous intéresse la liste est plus restreinte : 1841-1926. Neuf recensements en ligne.
En quelques heures et avec les arbres en ligne sur Geneanet, j’ai finalement trouvé 63 individus, 13 unions, 21 noms et 48 prénoms sur ce petit morceau de terre et ses alentours. Je ne suis pas allée bien loin dans ma visite, tout au plus un rayon de six kilomètres autour de Betille, avec en destination Labathude, Saint-Maurice-en-Quercy ou Bressou.
Avec le recensement de 1841, j’ai rencontré Antoine AMADIEU (1789-1869), forgeron puis propriétaire cultivateur, il est né à Saint-Maurice-en-Quercy.
Antoine épouse Rose TOURNIE (1803-1849), une fille de Betille. Le couple s’y installe et fonde une famille.
En 1841, Antoine a cinquante et un ans, il est encore forgeron. Le foyer compte six enfants : Jeanne, Marianne, François, Marie, Louis, Julie et Justine. Les âges des individus ne sont pas notés sur ce recensement, difficile de s’y retrouver.
Une seconde famille AMADIEU figure sur le recensement de 1841, celle de Pierre, de son épouse Jeanne COMIARD et de leur fille Cécile. Je ne retrouve pas ce foyer sur les recensements suivants.
1886, Antoine AMADIEU et Rose TOURNIE sont tous deux décédés. Un de leurs fils, Louis, habite toujours Betille. Il y est né en 1833, a épousé Sophie DOLIQUE en 1860, à Labathude, dont elle est originaire. Ils ont eu au moins quatre enfants de vingt-trois à quatorze ans : Thérasie, qui sera ensuite dénommée Thérèse, Elie, Charles et Marie Germaine. Ils emploient une bergère de quatorze ans, Marie CAYROL.
Dix ans plus tard, Elie AMADIEU, le fils aîné de Louis et Sophie, est resté au foyer. Il a pourtant fondé sa propre famille avec Sidonie FERRAND. Il a trente ans, sa femme, originaire de Saint-Bressou, vingt-deux. Leur fille Elia, fête son premier anniversaire.
Ils vivent tous trois sous l’autorité de Louis, passé de brocanteur à cultivateur. Le père héberge aussi Michel CANTALE, domestique de dix-sept ans et Eulalie CROS, qui a succédé à Marie CAYROL, comme bergère.
1901, 1906, les recensements se succèdent, la famille d’Élie et Sidonie s’agrandit, avec Anselme Éloi « Louis » en 1898, Armand en 1903, puis Léon en 1903. Tout le monde est sous l’autorité de Louis et les domestiques succèdent aux domestiques.
1911, Elia, l’aînée d’Élie et Sidonie a seize ans. Elle est encore très jeune et n’imagine sans doute pas que quinze ans plus tard elle vivra toujours avec ses parents. Fondera-t-elle un foyer ? Continuera-t-elle à vivre là sans se marier ? La guerre sera passée par là.
A partir de 1911, plus de domestique chez les AMADIEU, Elia, jeune-fille, il n’y a peut-être plus de besoin ?
1921, Élie est chef de famille, il a cinquante-six ans. Son père Louis est décédé à plus de soixante-dix-sept ans. Sa mère, Sophie DOLIQUE vit toujours avec lui. Elle est passée en dernière position sur le recensement, derrière sa bru et ses petits-enfants. Elle a quatre-vingt-quatre ans.
Par contre l’autre Louis, le fils d’Élie et Sidonie, Anselme Eloi « Louis » AMADIEU a quitté la famille.
En 1917, à dix-neuf ans, Louis est parti à la guerre. Il a été fait prisonnier un an plus tard, loin de Bétille, à Ostel, dans l’Aisne.
Puis il est monté en grade, caporal, sergent.
Démobilisé, il a décidé de devenir gendarme, élève d’abord en 1921, à Toul, puis à Versailles.
Il gagne encore du galon, devient lieutenant en 1933, regagne la 2nde légion de Garde Républicaine mobile à Aire-sur-Adour.
Je perds ensuite sa trace à Aurillac où il est affecté comme capitaine en septembre 1940.
Oh ! Il est bien tard !
Je vais pouvoir aller faire voiture-balai à Paris, je vais même avoir manqué l’arrivée du Tour de France messieurs aux Champs-Elysée !
Mais je ne regrette pas cette petite balade à Bétille, à la Bastide Vilapourte et auprès de quelques AMADIEU, parce que c’est le Tour de France de généalogie qui m’intéresse !
Sources et sites à découvrir :
https://lacapelle-marival-tourisme.fr/
https://www.vilapourte.fr/
https://www.quercy.net/accueil/tourisme/gastronomie/les-produits/la-chataigne/ https://www.fredonoccitanie.com/surveillance/foret/le-cynips-du-chataignier/
Richesse et pauvreté aux champs en Périgord au temps de Jacquou le Croquant, Corinne Marache, Dans Histoire & Sociétés Rurales 2012/1 (Vol. 37), pages 117 à 148.
Listes nominatives de recensement de Lacapelle-Marival, site des Archives Départementales du Lot.
Registres matricules et leurs tables, Cahors, site des Archives Départementales du Lot.
Félicitations pour votre acceptation dans la formation 👏
Merci 🙂