Le 18 septembre 2021, j’ai rencontré Pierre Gaston Octave BOUVIER au cours d’un long #RDVAncestral. Je vous ai relaté la remise des prix de la faculté de médecine et de pharmacie de Bordeaux, de ce 4 novembre 1901, à laquelle j’ai pu assister. Et puis Pierre m’a parlé de sa famille, de son père, Octave Charles BOUVIER (1844-1903), de sa mère, Marie Catherine Anaïs « Berthe » DUPRAT (1846-1898), de ses frères, Gustave « Charles » et Jean Pierre, d’Élisabeth et Jeanne Catherine, ses jeunes sœurs.
Les garçons sont tous des scientifiques, font des études supérieures à Bordeaux et exerceront des métiers en relation avec les sciences, comme leur père, ou leur grand-père maternel, Pierre Dominique DUPRAT, tous deux pharmaciens, le premier à Bordeaux (33) et le second à Blanquefort (33). Les garçons seront médecin pour Pierre, préparateur de chimie à la faculté pour son ainé Charles, et pharmacien, pour Jean.
Et les filles me direz-vous ? Quelles études ont-elles suivies ?
Pour Élisabeth, je n’en ai aucune idée pour l’instant. Pour Jeanne Catherine, la presse m’en a appris davantage.
Dans les colonnes de « La Petite Gironde » du 12 novembre 1900, on trouve en page 3, la relation d’une remise des prix très intéressante.
Décidément l’époque était friande de récompenses.
En 1900, Jeanne Catherine BOUVIER (1885-1958), arrière-grand-mère de Monsieur mon mari, a tout juste quinze ans. La demoiselle a appris ce qui est très prisé à la Belle Epoque : la dactylographie.
La Société de Sténographie du Sud-Ouest organise, comme chaque année, « un dimanche après-midi de novembre, la « distribution solennelle des récompenses aux lauréats de ses cours publics et gratuits ». Cela se déroule en grande pompe dans le grand amphithéâtre de l’Athénée de Bordeaux.
De hauts personnages honorent la cérémonie de leur présence : un conseiller d’Etat, un inspecteur de l’instruction publique, le secrétaire général de la Ligue française de l’enseignement. Le conseil d’administration de la Société de Sténographie du Sud-Ouest est au grand complet et bien sûr de « nombreuses notabilités » sont présentes. Le journaliste n’arrive même pas à toutes les citer.
Les discours s’enchainent. Les deux professeurs, Messieurs CAMIN et LOUSSERT, sont récompensés par la Ligue Française de l’enseignement puis on déroule le palmarès de l’année.
Sont cités de nombreuses catégories de sténographie et de « machine à écrire », de nombreux cours dispensés à l’Athénée, au lycée de jeunes filles, dans les écoles communales de garçons et de filles, au sein du comité de patronage des apprenties de la Gironde, ou dans des institutions privées.
Parmi les personnes primées, on traouve des hommes, des femmes, des jeunes filles, des enfants, garçons et filles, dont notre Jeanne Catherine BOUVIER pour la catégorie « machine à écrire, certificat de capacité -Athénée, deuxième année ».
La cérémonie est solennelle mais aussi festive avec « toute une phalange d’artistes amateurs » qui sont applaudis.
On imagine facilement la jeune Jeanne, avec une jolie robe, venir, sur l’estrade du grand amphithéâtre, chercher son prix, avec ses camarades.
Je ne sais pas si cet apprentissage de la dactylographie a servi à Jeanne. Je ne sais pas si elle a été secrétaire médicale de son époux, Camille Victor BOUTIN (1876-1967). Ils se sont mariés trois ans après cette cérémonie, le 5 novembre 1903. Elle avait dix-huit ans.
Mais pour moi, impossible de penser dactylo, sans que ne résonne dans ma tête ceci :
The Typewriter, Leroy Anderson
Alors cliquez et on l’écoute ensemble…
Pour aller plus loin :
La Petite Gironde du 12 novembre 1900, p3 in Retronews.
Dactylographie in Wikipedia
J’ai adoré la musique de fin !!!
Une véritable mise en scène cette remise des prix
« Mon fils tu seras médecin », « ma fille tu seras dactylo » ! dans les milieux bourgeois s’entend… On en était encore bien trop souvent là dans les années 60, le nombre de jeunes filles qui ont été « envoyées » en sténo-dactylo avec des capacités et des envies bien différentes et combien de femmes se sont retrouvées en retraite anticipée avec ce beau métier quand l’ère des ordinateurs a pointé son nez! Bon je suis une militante car sans doute que maintes femmes y ont trouvé motivation et joie, telles les standardistes de l’époque! Il aura quand même fallu juillet 1965 pour que les femmes puissent ouvrir un compte bancaire et travailler sans le consentement de leur très cher époux et 1970 pour que l’on supprime la notion de chef de famille dans le code civil. Ton reportage généalogique est génial Laurence et il m’a passionné, comme tous ceux que tu écris, c’est juste que je frémis quand je me souviens de tant d’injustices concernant les femmes, il n’y a pas si longtemps en Europe et toujours aujourd’hui dans d’autres pays!Je pense à ma grand-mère maternelle Catherine, si cultivée et intelligente et qui n’a pas eu le choix des études, bien que d’un milieu aisé, je la revois auprès de son père à la fin de sa vie, fille très attentionnée et quelque peu « esclave »…
UN IMMENSE MERCI LAURENCE et BRAVO de tout ce travail et cette passion que tu mets à tes recherches passionnantes !
Il y a toujours de quoi faire dans le domaine de l’égalité, on y travaille 😉