Aujourd’hui je voudrais vous parler psychogénéalogie et très précisément de la symbolique des prénoms.
Je sais… Je l’ai déjà fait la semaine dernière, en évoquant les circonstances mystérieuses de la mort de Marie Thérèse BERTRAND. Mais que voulez-vous c’est par là que j’ai commencé la généalogie ! Alors, évidemment, c’est un sujet qui m’intéresse.
Pour ceux qui sont allergiques à tout ce qui commence par « psy », rassurez-vous, on ne va pas aller très loin : une définition pour vous expliquer de quoi il retourne ; on s’étonne ; et on s’amuse des apports de cette méthode. Voilà les seuls objectifs sur HDNFamilles !
La psychogénéalogie recherche, chez nos ancêtres, ce qui pourrait avoir une résonance avec nos propres difficultés, avec qui nous sommes liés parmi nos aïeux.
La méthode a été développée par Anne Ancelin-Schützenberger.
La psychothérapeute avait constaté des coïncidences de dates chez ses patients entre le déclenchement d’un cancer et le décès d’ancêtres.
Pour mettre en évidence ces coïncidences, elle a créé le « génosociogramme », arbre généalogique qui reprend les événements des membres d’une famille sur quelques générations (naissances, mariages, décès, fausses-couches, accidents…).
Les événements marquants, qui nous lient à nos anciens, ne sont pas exclusivement malheureux.
Si nous pouvons ainsi retrouver des « syndromes d’anniversaires » liés à des accidents ou des décès, des événements heureux sont aussi inscrits dans notre histoire familiale.
Rappelez-vous ce que je vous expliquai le 31 août dernier. Je suis née ce jour-là, celui où l’on célèbre les Aricie. Et sur mes branches je vous invitai à rencontrer Aricie Julienne PIERRE (1850-1896), mon arrière-arrière-grand-mère.
Voyons de plus près ce que la psychogénéalogie peut nous apporter avec l’exemple de la date du jour, le 10 avril.
Nous nous limiterons aux prénoms. Encore une fois, mon propos ici est juste de se questionner et de s’étonner en s’amusant si possible.
Le 10 avril est un jour qui apparaît côté MARZIN, dans la généalogie de Monsieur, mon mari, avec deux naissances.
La première de ces naissances concerne un contemporain. Je n’en dirai donc pas davantage, il se reconnaîtra. Je veux seulement ici lui souhaiter : Joyeux Anniversaire !
Seconde personne des branches MARZIN à être née un 10 avril :
Jean Louis TERLON (1898-1936), le grand-père maternel de Monsieur.
Il est né à Guignicourt, dans l’Aisne, en 1898.
Il est le fils de Gustave Henri TERLON et de Marie Louise LECOMTE (1872-1945).
La famille emménage à Grisolles (Aisne) et c’est dans cette commune que comme tant d’autres de sa génération Jean Louis est mobilisé. Il vient d’avoir dix-neuf ans.
Incorporé le 4 mai 1917, il est canonnier au 40ème Régiment d’Artillerie.
Malade, il est hospitalisé le 25 janvier 1918, à Plouguernevel (Côtes-d’Armor), à côté de Rostrenen. L’hôpital complémentaire N°72 y a été installé dans l’École d’Agriculture, et compte 580 lits.
Il y reste deux mois, puis en mai il retourne au front.
Jean Louis sera démobilisé le 23 octobre 1919.
Il conservera de cette période un pneumothorax et sera réformé définitivement en 1933.
Sur sa fiche matricule, il est noté à cette date : « Crache encore un peu ».
Entretemps, Jean Louis TERLON s’est installé à Brie-Comte-Robert, 16 rue des Halles.
Le 6 septembre 1924, il a épousé, dans cette ville de Seine-et-Marne, Eva Emilienne MATHIEU (1904-1991), une fille de l’Aisne, comme lui, née à Bouconville-Vauclair.
Au fil des années, le couple devient famille avec la naissance de trois filles : Geneviève en 1925, Christiane en 28, puis Denise l’année suivante.
Après avoir été ouvrier agricole et botteleur, Jean Louis est devenu terrassier.
En 1936, il héberge son jeune frère Georges, qui travaille aussi dans le bâtiment, comme électricien.
Et puis Eva a trouvé un emploi. Elle est manutentionnaire à Paris. Elle y réside. Sont-ils séparés ?
Je ne sais pas dans quelles circonstances, Jean Louis TERLON décède le matin du 3 décembre 1936, à huit heures trente, au 25 rue de Melun, à Lagny-sur-Marne. Il a trente-huit ans.
Sa dépouille sera transportée à Brie-Comte-Robert trois jours plus tard.
Et la psychogénéalogie dans ce parcours de vie ?
Jean Louis TERLON est né un 10 avril. Ce jour-là, le calendrier indique que l’on fête les Fulbert.
Encore un prénom devenu rare, tellement rare qu’il n’est pratiquement plus donné en France depuis 2000.
L’étymologie de Fulbert est germanique, de « full » et « berht » et signifie « peuple brillant ».
La région de Chartres regroupe un nombre non négligeable de porteurs du prénom et pour cause.
Saint-Fulbert fut évêque de la ville entre 1006 et 1028.
Il fut aussi un prestigieux érudit des alentours de l’an Mil en Occident.
Fulbert a fait autorité en médecine, mathématiques, grammaire ou théologie. Il était aussi spécialiste de rhétorique et enseignant de renom, un écolâtre*.
Proche du roi Robert-Le-Pieux (vers 972-1031), c’est ce souverain qui l’a fait nommer évêque.
En septembre 1020, la foudre frappe la cathédrale de Chartres et le bâtiment subit un violent incendie.
Fulbert décide de la reconstruire et sollicite de grands seigneurs du royaume comme de l’étranger.
Ainsi Guillaume V duc d’Aquitaine participe au projet.
La même année le seigneur avait sollicité l’évêque en matière politique et dans une lettre restée célèbre, Fulbert lui répond et définit les devoirs des vassaux vis-à-vis de leur suzerain.
Fulbert mourut le 10 avril 1028 et fut enterré au monastère de Saint-Père-en-Vallée, devenu aujourd’hui le lycée Marceau de Chartres.
On notera qu’alors que Fulbert était évêque, cette abbaye a été dirigée par Magénard, abbé imposé par le comte Thibaut II de Blois avant le décès de son prédécesseur. Pendant quelques mois, les moines se sont alors réfugiés à l’abbaye Saint-Pierre de Lagny, située en Seine-et-Marne, à Lagny-sur-Marne.
Dans son ouvrage, la symbolique des prénoms en psychogénéalogie, Paola Del Castillo postule que le choix d’un prénom peut « résulter des histoires de vie de nos aïeux, des croyances populaires et religieuses, des dates signifiantes du calendrier ».
Elle évoque le 10 avril dans le chapitre des faits historiques et des guerres de religion, au sein du paragraphe réservé à l’histoire des cathédrales.
Elle fait référence à Saint-Fulbert, à Robert-Le-Pieux, fils d’Hugues Capet.
Elle demande au lecteur si les prénoms Robert, Hugues ou Jules (fêté le 12 avril) figurent sur ses branches, si des métiers du bâtiment y sont présents, comme des architectes, des maçons, charpentiers, vitriers…
Tout cela m’interroge.
Dans la famille MARZIN, je ne connais personne qui se souvienne de Jean Louis TERLON et d’aucuns en lisant cet article vont sans doute découvrir cet aïeul oublié.
Je vous laisse vous faire votre opinion mais pour ma part je trouve cette accumulation de coïncidences étonnante :
- Un de nos contemporains né exactement le même jour que Jean Louis TERLON, le 10 avril.
- Les prénoms Robert et Guillaume présents sur les branches et sur plusieurs générations.
- Jean Louis TERLON résidait à Brie-Comte-Robert, est décédé à Lagny-sur-Marne, rue de Melun. Encore un Robert et des abbayes Saint-Père à Chartres, Lagny et Melun.
- Plusieurs architectes, la présence du prénom Pierre (mémoires de bâtisseurs), alors que Jean Louis TERLON était terrassier.
Qu’en déduire ? Pour l’instant, mes recherches en sont là.
Reste à explorer la piste de Chartres, des cathédrales…
Peut-être le contemporain né le 10 avril pourra m’y aider ?
Il est professeur d’histoire, alors peut-être aura-t-il une idée ?
* L’écolâtre (du latin scolasticus > scholaster) était, au Moyen Âge, le maître de l’école monastique ou de l’école cathédrale. La fonction était importante et nombreux furent les écolâtres qui devinrent écrivains de renom, théologiens, ou évêques, voire pape (Sylvestre II). Wikipedia
Sources :
Nominis, Wikipedia,
La psychogénéalogie, Erik Pigani, Psychologies, juin 2018
Fiche matricule TERLON Jean Louis AD77 FRAD077_1r1471_0191 vue 276
Fulbert est nommé évêque de Chartres Automne 1006, Pierre Riché, France Archives.
Fulbert de Chartres, Les incontournables, site Chartres Tourisme.
Qui était Fulbert, site du Lycée Fulbert de Chartres.
Contexte France, Thierry Sabot, Editions Thisa, 2021
La symbolique des prénoms en psychogénéalogie, Paola Del Castillo, Collection Ressources et Santé, Editions Quintessence, 2006.