Il est encore temps de se préoccuper des amoureux de la famille Jézéquélou. La Saint-Valentin, c’était il y a quatre jours seulement. Mais, les amoureux, c’est vite dit, car les registres ne parlent pas de cela. La trace des épousailles se rencontre bien sur le papier, mais pour l’amour, mystère et boule de gomme.
Aucun mariage un 14 février, rabattons-nous sur celui de René Garin et Jeanne Riou, le 19 février 1753. Demain, cela fera exactement deux-cent soixante-dix ans qu’il a été célébré.
Voici une belle occasion d’essayer la dernière fonctionnalité du GPSQ de ma quantiquette : le voyage par coordonnées personnelles de l’ancêtre à rencontrer. Pour moi qui n’aime pas trop les chiffres, la dernière mise à jour de cet outil quantique tombe à pic.
Je fais le réglage. Coup d’œil sur mon logiciel de généalogie. Je recherche les parents de Jeanne Garin. je lui avais rendu visite en janvier. J’espère bien que sa mère est aussi sympathique qu’elle.
Nous avons dit Marie Riou. Contact ! Dernier coup d’œil à la fiche…
Ah non ! C’est pas vrai ! La mère de Jeanne, ce n’est pas Marie Riou, mais Jeanne Riou !
Flute ! Je suis propulsée à travers le temps. Il faudra bien faire avec, je n’ai pas les moyens de faire plusieurs voyages dans le mois, encore moins dans la même journée.
Me voici déjà arrivée à destination. Chouette, la chapelle de la Clarté ! Aujourd’hui, j’évite de prendre un bain comme le mois dernier.
Il y a deux femmes en contrebas du chemin, à proximité de la fontaine. Je vais à leur rencontre :
« Quelle belle journée »
« C’est un plaisir, répond la première, et j’espère que cela va durer. Nous préparons le mariage d’un de mes neveux de Froutguen, un fils de ma sœur Jeanne. Après le décès de ma mère en février dernier, voilà une bien meilleure affaire. »
« Ta demi-sœur », rectifie sa voisine. Tu sais bien Marie, que ton père a eu plusieurs enfants de son mariage avec Jeanne Riou ».
Je comprends que je ne rencontrerai pas Marie Riou, mais que j’ai en face de moi sa fille et très certainement sa belle-fille. Cette dernière poursuit sur un ton ironique :
– Et puis avec René, ils avaient mis la charrue avant les bœufs. Ta mère l’a souvent raconté ! »
Elle sourit, mais Marie n’a pas l’air d’apprécier et enchaîne aussitôt :
« Il faut dire qu’il leur avait fallu attendre la dispense pour affinité au troisième degré. L’évêque l’a bien signée mais entre les fiançailles et les publications des bans, mon frère, René, est arrivé avant les noces. »
– Six enfants ont suivi. Ton mari est né, ici à Saint-Vennec, peu de temps avant la petite aînée de Jeanne. »
Je me permets de ramener la conversation sur le but de mon voyage temporel :
« Quel âge ont les futurs mariés de demain ? »
« Voyons, tu le sais toi, Catherine, leur âge ? Je dirais la vingtaine.
– En tout cas, cela aura pris plus de temps aux familles pour se mettre d’accord que pour nous. »
« Bah, pour nous, cela pressait », reprend Catherine.
– Ta mère était veuve, alors il ne faut pas s’étonner d’avoir été marié jeune. »
Marie Garin se tourne de nouveau vers moi :
« C’est vrai, ma sœur, Jeanne avait seize ans quand elle s’est mariée, tout comme mon frère Alain. Toi, Catherine, tu avais dix-neuf ans et moi, seulement quatorze ans. »
Sa belle-sœur reprend en riant : « Heureusement, ton futur n’était pas trop vieux ».
Je trouve une vague excuse pour m’éloigner. Je vais les laisser deviser. J’ai des vérifications à faire.
Je rentre à la hâte, reprends mon fichier de généalogie. Voyons ça :
Marie Garin a épousé Michel Kerviel en 1789, elle avait bien quatorze ans. Il avait fallu une décision de justice de l’ancienne baronnie de Pont-l’Abbé. Une spécificité bretonne que ces décrets de mariage pour les mineurs.
Quant à son neveu, Jean Jézéquélou, le fils de Jeanne Garin et Pierre Jézéquélou, il s’est marié en 1809, Marie avait alors trente-quatre. Elle était déjà mère de sept enfants.
Des mariages si jeunes ! 14 ans , 16 ans ! Au fait ta quantiquette est électrique ? existe-t-il des vignettes crit’air pour voyager dans l’espace ?
A quantiquette dernier cri, vignette Crit’air 1😂