1882 : L’Annuaire-almanach témoigne d’un XIXe siècle en pleine mutation

L'annuaire général du commerce de l'industrie de la magistrature et de l'administration de 1882 - en ligne sur Geneanet

À mi-chemin entre la Révolution industrielle et la Belle Époque, l’année 1882 est une étape charnière dans l’histoire économique et sociale de la France. L’Annuaire-almanach du commerce, de l’industrie, de la magistrature et de l’administration publié cette année-là en est une illustration saisissante. Dense, structuré, orienté vers le monde des affaires, il reflète une société bien différente de celle décrite en 1836.

Un outil pour les acteurs économiques

Contrairement au premier annuaire départemental, encore centré sur l’administration locale, l’annuaire de 1882 s’adresse clairement aux acteurs économiques. Il devient un outil de travail pour les négociants, les industriels, les banquiers, les entrepreneurs. On y trouve une multitude d’adresses professionnelles : usines, commerces, maisons de négoce, transporteurs, banques, assurances…

La France entre pleinement dans l’ère capitaliste : la structure même de l’annuaire s’adapte à cette logique de marché. Il est devenu un répertoire économique national, où les professions libérales, les commerçants et les industriels apparaissent à égalité avec les représentants de l’État.

Des métiers en expansion

L’annuaire reflète aussi l’explosion de nouveaux métiers et secteurs. Le mot industrie est omniprésent. Les professions techniques et scientifiques se multiplient : ingénieurs civils, électriciens, mécaniciens, imprimeurs, typographes. On y croise aussi les chefs d’ateliers, les entrepreneurs de travaux publics, les transporteurs ferroviaires – autant de figures nouvelles qui n’apparaissaient pas ou peu dans les décennies précédentes.

La présence accrue de sociétés anonymes, de compagnies, d’agences – souvent identifiées par leur raison sociale – témoigne d’une structuration de l’économie autour de l’entreprise moderne. Cela complexifie la recherche pour le généalogiste, qui devra parfois remonter jusqu’aux registres de commerce ou archives notariales pour retrouver un lien familial.

Un miroir de la société urbaine

Autre changement majeur : la place croissante des grandes villes. Paris domine évidemment, mais les villes de province comme Saint-Brieuc, Guingamp, Dinan ou Lannion prennent une importance nouvelle. Les villes se peuplent, s’industrialisent, se modernisent. Les services publics urbains apparaissent plus étoffés : poste, télégraphe, écoles, tribunaux, chambres de commerce…

Le tissu social s’enrichit : notaires, avocats, huissiers, mais aussi comptables, directeurs de théâtre, éditeurs, photographes. Des professions qui incarnent une diversification des services – et une société bien plus mobile et urbaine qu’en 1836.

Un outil précieux pour la généalogie

Pour les généalogistes, l’annuaire de 1882 est une mine d’informations contextuelles :

  • Il aide à préciser la profession d’un ancêtre, souvent indiquée dans l’état civil de façon floue ou générique.
  • Il permet d’identifier un employeur, un atelier, une société, un commerce familial.
  • Il éclaire les conditions de vie et l’environnement socio-professionnel des individus.
  • Il montre l’apparition de certaines dynasties d’entrepreneurs, avec parfois plusieurs générations d’une même famille dans un même secteur.

En croisant les données de l’annuaire avec les recensements, les actes notariés et les registres de commerce, on peut reconstituer de véritables parcours professionnels et saisir l’évolution d’une famille au sein du tissu économique local.

Une société tournée vers le progrès

L’esprit qui anime l’annuaire de 1882 est résolument moderne : foi dans le progrès, valorisation de la technique, centralité du commerce. C’est le reflet d’une France conquérante, qui bâtit ses grandes infrastructures, développe ses réseaux ferroviaires, et commence à imaginer ses futures métropoles.

Mais c’est aussi une société de contrastes : les disparités régionales restent fortes, les classes sociales bien cloisonnées, et l’urbanisation encore inégale. L’annuaire en porte la trace, en montrant les zones dynamiques et celles qui restent rurales et traditionnelles.


📞 Demain, pour conclure cette série, nous ferons un bond dans le XXe siècle avec l’annuaire de 1913 des Côtes-du-Nord. Nous y découvrirons l’arrivée du téléphone, et l’entreprise de Charles Marzin, mécanicien à Lannion, qui porte fièrement le numéro 24

1 commentaire

  1. Plus annuaire tel que nous l’avons connu qu’almanach … Changement, changement … et aujourd’hui les pages blanches et jaunes sur Internet … Plus rien pour rehausser les petits sur la chaise de la table à manger

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