Semaine 49 – Un insigne, une histoire familiale

Mon père était instituteur. Un maître d’école « à l’ancienne », comme on disait autrefois. Tout est relatif, bien sûr : il a commencé sa carrière en 1959, à Attancourt, en Haute‑Marne.

À cette époque, les enseignants pratiquaient encore les corrections physiques pour recadrer les élèves récalcitrants. Mais mon père, lui, portait surtout l’amour du métier profondément en lui. Aujourd’hui, on parlerait d’empathie, d’attention portée à chaque enfant. Hier, on disait plutôt  : « Qui aime bien châtie bien. »

Il a servi l’Éducation nationale toute sa vie. Trop jeune pour être un véritable hussard noir de la République, mais je suis convaincue que c’est ainsi qu’on l’aurait décrit s’il avait enseigné à la fin du XIXᵉ siècle.

Après Attancourt, il a poursuivi sa carrière à Saint‑Dizier, toujours en Haute‑Marne. D’abord simple instituteur, puis directeur de l’école Jean Moulin. Là encore, il était apprécié : par ses collègues, par les parents d’élèves, et surtout par les enfants.

Le mérite enseignant et les Palmes académiques

Adulte, j’ai souvent pensé que mon père méritait une distinction. Et dans l’Éducation nationale, la distinction emblématique, ce sont les Palmes académiques.

De temps en temps, nous apprenions qu’untel était nommé chevalier. Je me surprenais à me demander : « Pourquoi lui ? » Son mérite ne me semblait pas supérieur à celui de mon père.

Et pourtant, pour mon père, rien.

Ni l’inspecteur primaire, ni l’inspecteur d’académie n’ont pensé à le proposer. Peut‑être suis‑je mauvaise langue, mais j’ai souvent entendu dire que peu d’enseignants du premier degré étaient nommés. Et encore moins de personnels non-enseignants.

Une distinction dédiée en silence

Alors, le jour où j’ai moi‑même été honorée de cette distinction, j’ai pensé à lui.

Pendant la cérémonie, en silence, j’ai dédié mes palmes académiques à mon père.

À son engagement, à sa droiture, à son humanité.

À ce maître d’école qui n’a jamais reçu d’insigne, mais qui a marqué tant de vies.

2 commentaires

  1. On sent tout l’amour que vous portez à votre père, c’est beau à lire. Il avait la reconnaissance des enfants, le souvenir immuable qu’il leur aura laissé pour toute leur vie est la plus belle des distinctions.
    Bravo à vous pour votre parcours également 👏

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