Élu du 1er mai

Le mois d’avril 2022 est terminé et avec lui le #généathème « Elections ».
Je vais pourtant jouer les prolongations et faire comme si avril avait trente et un jours.
Lors de mon dernier #RDVAncestral, j’ai rencontré, ou plutôt Annabelle Lucarne a rencontré mon grand-père paternel, Marius PORTE (1915-1986), alors conseillé municipal dans les années 70.
Dernier des sept enfants de Marie « Léonie » CONSTANTIN (1874- ?) et Eugène « Octave » PORTE (1873-1934), Marius avait une sœur et cinq frères.
Au sein de la fratrie, c’est de Maurice que Pépère était le plus proche.

Pour l’état civil, Maurice est Philomen Maurice Benjamin PORTE.
Il est né le 18 mai 1909, à Vaux-sur-Blaise, comme tous ces frères et sœurs.
Il est le cinquième enfant et a six ans de plus que Pépère.
Pour la famille Maurice était tout simplement le Zozo.


Surtout n’oubliez pas l’article défini devant son surnom. Vous avez parfaitement lu : « le Zozo ». C’est du haut-marnais pur jus, cette habitude de mettre le ou la devant les prénoms, les noms et les surnoms.
Pourquoi « le Zozo » ? Mystère et boule de gomme, je n’en ai absolument aucune idée. Et même si enfant, je savais que « le Zozo » s’appelait Maurice, j’ignorai totalement ses deux autres prénoms : Philomen et Benjamin.

Le Zozo avait donc six ans de plus que Pépère, et au décès de leurs parents Marius avait dix-neuf ans et Maurice vingt-cinq.
En 1934, Maurice était déjà établi. Jeune papa de deux petites filles, Marinette et Annette, il avait épousé Marie Alice EPP, le 30 mai 1931 à Saint-Joire (Meuse).
Sans être très éloigné de Vaux-sur-Blaise, Saint-Joire est tout de même à quarante-cinq kilomètres de Vaux. Qu’est-ce-que Maurice était allé faire là-bas ? Encore un mystère et une boule de gomme.
Quoique… Dans les recensements, j’ai trouvé trois autres habitantes de Vaux originaires de Saint-Joire :

  • Elina LEFEVRE, née en 1887
  • Germaine REGNAULT, née en 1893
  • Annette PORTE, née en 1933.

Pour Annette, naître dans le village de ses grands-parents maternels, cela s’explique.
Pour les deux autres femmes, ce qui les rapproche encore, c’est qu’elles ont été toutes deux domestiques chez les BOUCHENOT, les patrons de l’usine.
De là à penser que Marie Alice EPP est arrivée à Vaux comme domestique chez les BOUCHENOT… Une piste à creuser…

Dès qu’ils ont été en âge de travailler, les fils PORTE sont entrés à l’usine comme mouleurs.
Sur le recensement de 1921, Gaston, quatorze ans, est au travail, Maurice n’a pas douze ans, il est encore sans profession. Sur celui de 1926, il n’y a plus que Marius, onze ans, qui ne travaille pas, Paul à quatorze ans est mouleur comme les aînés. Le père d’emballeur a pris un poste d’ajusteur aux fonderies Bouchenot.
Les lois de 1874, 1882 et 1892 étaient passées par là, limitant successivement le travail des enfants à 12 ans, diminuant le nombre d’heures puis rendant l’obtention du certificat d’études obligatoire pour commencer la vie de labeur.
Les enfants PORTE sont probablement entrés à l’usine vers treize ou quatorze ans et il faudra attendre 1936 pour que la scolarité devienne obligatoire jusqu’à quatorze ans, puis 1959 pour passer à seize ans et reculer encore l’entrée dans la vie active.

En 36, Maurice héberge son jeune frère Marius.
Rue de la Fontaine, le foyer s’est agrandi et compte six personnes : Maurice, sa femme Alice, trois filles et Marius.

Encore une année et mon grand-père fondera aussi son foyer. Il épousera Andrée CINET dans l’urgence. Un bébé est arrivé un peu plus tôt que prévu, mon père.

Après la guerre, en 1946, Maurice reste mouleur chez Bouchenot. Sa famille compte quatre enfants de plus, deux garçons et deux filles.
Je ne sais pas quand il entre dans le syndicalisme puis la politique.
Je n’ai trouvé sur Internet que peu d’informations sur la vie de mon grand-oncle. Mais tout de même Gallica conserve quelques articles que j’ai tirés de « la Champagne, hebdomadaire régional d’informations du parti communiste français ».

Le dimanche 7 mai 1950, la Champagne met à la une le « 1er MAI DE LUTTE pour la Paix » et les « 2.000 MANIFESTANTS A REIMS ». En page 5, celle consacrée à la Haute-Marne, l’hebdomadaire rapporte qu’à Saint-Dizier on lutte « contre la bombe atomique », que les frères Garnier, médecins à Saint-Dizier, signent l’appel de Stockholm ».
L’encart consacré à Wassy voisine avec une publicité pour le journal Vaillant, qui deviendra Pif gadget en 1969. Étonnant rapprochement pour un article qui titre « la population proteste contre la politique de misère et de guerre ».

La Champagne 7 mai 1950_Gallica_Capture d’écran 2022-05-01

Fin mai, tandis que l’appel de Stockholm continue de faire la une, l’hebdomadaire présente les listes de candidats que la CGT présente aux caisses de Sécurité Sociale et d’allocations familiales.
C’est bien à ces élections que nous retrouvons Maurice PORTE et en tête de liste.

Le secrétaire de l’Union Départementale de la CGT ne tarit pas d’éloges pour « des candidats connus et aimés de la classe ouvrière de la Haute-Marne. Ce sont ceux qui se sont montrés en toutes occasions les meilleurs défenseurs de la classe ouvrière dans la lutte pour les revendications et dans la lutte contre la guerre. »

La Champagne 28 mai 1950 Gallica Capture d’écran 2022-04-30
La Champagne 29 avril 1951 Gallica
Capture d’écran 2022-05-01

Le scrutin a lieu le 8 juin 1950 et Maurice est élu. La CGT recueille 61% des suffrages. La Champagne en rend compte dans ces colonnes le 18 juin 1950, mêlant encore élections et appel à lutter contre la guerre.

L’année suivante, dans son édition du 29 avril 1951, l’hebdomadaire avertit ses lecteurs : Maurice PORTE, le maire de Vaux-sur-Blaise, n’a pas renouvelé son adhésion au parti communiste depuis 1948.
Mais ça, c’est une autre histoire !

Sans transition et pour le plaisir,
cultivons-nous un peu avec ces extraits de La langue française (Llf) :
« Mystère et boule de gomme » est l’expression préférée des grandes personnes lorsqu’elles doivent répondre à des enfants trop curieux. Vous l’avez d’ailleurs sûrement déjà entendue pendant votre enfance. Et vous faites désormais peut-être partie de ceux qui l’utilisent en faisant un sourire en coin et en haussant mystérieusement les sourcils. Il serait alors temps de savoir exactement ce qu’elle signifie et quelle est son origine. On ne sait jamais, si votre neveu vous pose la question…
(…)
L’expression « mystère et boule de gomme » est une interjection utilisée pour exprimer le mystère, une chose que l’on ne veut pas ou que l’on ne peut pas dévoiler, évidemment, mais aussi, parfois, l’incompréhension. On utilisera l’expression « mystère et boule de gomme » pour traduire une attitude perplexe face à une question à laquelle on n’a pas la réponse. (…)

Et j’ajouterai : Quant à l’origine de l’expression, alors là… Mystère et boule de gomme.

Sources :
1882 : l’interdiction du travail des enfants et l’école gratuite, Collectif POP, 2 novembre 2018.
La Champagne : organe régional du Parti communiste français In Gallica.
L’Appel de Stockholm, In Wikipédia.

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